LE TAMBORA



L’éruption du volcan Tambora (2857 m – 8°14’41S, 117°59’35E) en 1815 fut la plus destructrice de l’histoire moderne, plus violente même que celle du Krakatoa en 1883. L’éruption entraîna également la disparition de trois des cinq royaumes existant alors sur l’ile de Sumbawa : Pekat Sanggar et Tambora. Elle envoya 100 kilomètres cube de cendres dans la haute atmosphère, 7 fois plus que le Krakatoa, faisant de 1816 l’année sans été1.

Le 5 avril 1815 eut lieu une première éruption donnant une colonne éruptive de 33 km de hauteur et qui dura 33 heures. Les gens ne quittèrent pas leur maison. Durant les jours qui suivirent, le volcan demeura dans un état de basse activité. Le 6 avril, une légère chute de cendres fit comprendre aux habitants de Batavia (Jakarta aujourd’hui, à 1 260 km du volcan) que les détonations entendues la veille, qui avaient motivé l’envoi de patrouilles militaires par crainte d’une attaque, étaient d’origine volcanique.

Le paroxysme de l’éruption eut lieu 5 jours plus tard, le 10 avril. Vers 10 h du matin, une colonne éruptive de 44 km de haut monta dans le ciel, mais l’éruption dura seulement 3 heures. Vers 19 h, l’activité du volcan augmenta, suivie une heure plus tard d’une pluie de ponce sur le village de Sanggar, 30 km à l’est. Le volcan à ce moment était alors surmonté d’après les témoins de trois « colonnes de flammes », en fait trois colonnes éruptives. La chute de pierres ponces dura jusqu’à 22 h, lorsque le village de Sanggar fut ravagé par une onde de choc. Vers ce moment, toujours d’après les témoins, les trois colonnes fusionnèrent et la montagne ne fut plus qu’une masse de « feu liquide ». En conséquence, la colonne éruptive s’engorgea en matières et finit par s’effondrer, créant 7 coulées de gaz surchauffés, de cendres et de pierres ponces qui se sont étalées radialement autour du volcan et ont pénétré dans la mer jusqu’à 40 km de distance du sommet du volcan. Elles ont généré des explosions secondaires, augmentant le volume de cendres dispersés dans l’atmosphère. Le 12 avril, à 900 km de là à Java alors que retentissait au loin les explosions, les premières lueurs du jour n’apparurent qu’à 10 h et que ce n’est qu’à 11 h que les oiseaux se mirent à chanter. Ce n’est que le 15 avril que l’éruption cessa et le 17 avril que les chutes de cendre cessèrent, après s’être étendues jusqu’à 1 300 km de distance, en laissant un paysage dévasté sur la péninsule de Sanggar .

L’éruption eut une puissance estimée à 8 fois celle de l’éruption du Vésuve, soit plus de dix mille fois les bombes d’Hiroshima et de Nagasaki réunies. Les explosions ont été entendues à plus de 1 400 km de distance. À la suite de l’expulsion de tant de magma, le reste de la montagne s’effondra sur lui-même, et forma une grande caldeira de 6 km de diamètre et de 1 km de profondeur, diminuant ainsi l’altitude du volcan de 1 400 mètres.
Des raz de marée s’abattirent sur les îles à plusieurs centaines de kilomètres de distance. L’activité volcanique tua directement 11 000 personnes. À ces victimes s’ajoutèrent celles des tsunamis, de la famine et des épidémies qui sévirent sur Sumbawa et Lombok et qui tuèrent 49 000 personnes. Au total, l’éruption semble avoir tué entre 61 000 et 71 000 personnes1.

La cendre envoyée dans la stratosphère fit plusieurs fois le tour de la Terre, causant, au début de l’été, de magnifiques couchers de soleil rougeoyants, peints par le peintre William Turner : voir notamment Didon construisant Carthage (ou la naissance de l’Empire Carthaginois), 1815, National Gallery, Londres.
En 1816, les moyennes des températures dans l’hémisphère nord descendirent de 0,5 °C à plus de 1 °C. Les fermiers d’Europe et d’Amérique du Nord appelèrent cette année-là l’année sans été. Cette éruption a été la plus violente éruption volcanique jamais connue historiquement, et surtout la plus meurtrière de l’Histoire, bien plus forte que celle du Vésuve et pourtant beaucoup moins célèbre (pour ne pas dire inconnue). La quantité de matière émise a été de 150 km3, et a été bien plus importante que pour le Krakatoa et le Vésuve. L’éruption a affecté océans et tropiques, et tous les records de baisse de température ont été battus en 1815 et 1816.

Cette catastrophe fut à l’origine d’« étés glacés » ; les Alpes suisses furent particulièrement touchées, à tel point que pendant l’été 1816, il y neigeait presque toutes les semaines.
• l’« été sans soleil » de 1815 en Nouvelle-Angleterre, causé par le blocage des rayons solaires par les particules de soufre réparties dans l’atmosphère et la stratosphère ;
• l’été 1816, le plus froid jamais enregistré en Europe (dans les pays dotés d’une météo fiable), fut à l’origine d’une famine qui fit plus de 200 000 victimes.

Aujourd’hui, les recherches effectuées sur cette éruption sont de grande importance, parce qu’elles aident à distinguer les changements climatiques naturels de ceux créés par l’Homme.De nombreux témoignages des changements climatiques ont été fait par différentes personnes. Michael Chenoweth a étudié les journaux de bord de la marine britannique de l’époque, et ceux du capitaine du navire L’inconstant qui a fait des relevés très précis. Le président américain Thomas Jefferson a observé de façon précise tous ces changements climatiques.